👋 Hello, c’est Julien !
J’espère que tu vas bien en ce lundi de Pâques. 🥚🐇
Bienvenue dans l’édition #31 de Screenbreak 💌
L’heure d’évoquer une relation conflictuelle que l’on vit tous à différents degrés.
Un « je t’aime moi non plus » quotidien avec un objet de 200 grammes.
Les dynamiques de cette relation sont complexes et ambigües.
Quelque chose de flagrant en revanche : sa proximité physique quasi permanente.
Le smartphone est devenu une extension de nous-mêmes.
Ce qui m’a donné envie cette semaine de creuser le sujet de la distance.
Pour avoir une relation saine avec son compagnon de poche, il faut savoir la parsemer d’éloignement, pour ne pas risquer l’overdose.
Le smartphone doit parfois être loin des yeux, pour être loin du cœur (et du cerveau).
On est 1085 ici désormais ! À mesure que la communauté s’agrandit, j’aimerais la connaître un peu plus 👇
🍔 Au menu
Performance et proximité
Convivialité 2.0
Distance physique et contrôle de soi
La règle de la table
La petite trouvaille
🕑 Temps de lecture : 6 min et 12 secondes
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Let’s goooooo
📱 Performance et proximité
En 2017, une équipe de scientifiques de l'université du Texas a élaboré une expérience sur 548 étudiants.
Trois groupes ont été formés.
Il a été demandé à chaque groupe de mettre leur téléphone en silencieux, et ce dans 3 endroits différents :
Groupe 1 : sur leur bureau, visible et face cachée
Groupe 2 : dans leur sac/dans leur poche
Groupe 3 : dans une autre pièce
Tous les participants ont ensuite effectué plusieurs tâches qui mesuraient la « capacité cognitive disponible », notamment la mémoire de travail et l’intelligence fluide.
La mémoire de travail permet de manipuler des informations et d’aller les chercher dans la mémoire à long terme. Elle sert à retenir ces informations tout en les manipulant.
L’intelligence fluide désigne la capacité à penser logiquement, et à résoudre des problèmes dans des situations nouvelles, indépendamment des connaissances acquises.
Voici les résultats de l’expérience 👇
Si ce graphique n’est pas clair, le résultat est que plus loin est le téléphone, meilleure est la performance.
Plus précisément : sur le bureau < dans la poche < dans une autre pièce
Le chercheur Adrian F. Ward, à l’origine de l’étude, conclut 👇
« Nous observons une tendance linéaire qui suggère que plus le smartphone est visible et accessible, plus la capacité cognitive disponible des participants diminue. L’esprit conscient ne pense pas au smartphone, mais ce processus, qui consiste à vous obliger à ne pas penser à quelque chose, utilise une partie de vos ressources cognitives. »
En d’autres termes, avoir son téléphone à portée de main contraint notre cerveau à mettre une partie de son énergie pour résister à l’envie de le saisir.
Même quand il est face cachée et en mode avion.
Ainsi, ce ne sont pas seulement des stimuli comme les notifications qui viennent perturber la concentration.
La simple proximité du téléphone ébranle le cerveau, sans même que l’on s’en rende compte.
En l’éloignant physiquement, l’inconscient est libéré de cette charge invisible, et peut se mobiliser totalement sur la tâche en cours : on améliore notre productivité.
🤳 Convivialité 2.0
Tu as compris qu’un téléphone visible devient un vortex aspirant une partie des ressources attentionnelles disponibles.
Une partie de ces ressources est en effet occupée à résister à la tentation.
C’est un problème pour l’efficacité professionnelle, mais également pour notre vie sociale.
Les interactions physiques se retrouvent parasitées par la présence d’un smartphone dans le champ de vision.
L’exemple parfait est quand il est posé sur la table. Dans ce cas, il empêche inévitablement d’être 100% attentif à ses interlocuteurs.
Et pourtant, quand j’observe du coin de l’œil au restaurant ou au bar, la plupart des tablées ont des convives supplémentaires. Qui eux ne paient jamais l’addition.
89% des personnes ont sorti leur téléphone lors de leur dernière interaction sociale, selon une étude de 2015.
En sa présence, le cerveau va s’auto-déconcentrer machinalement : les distractions internes sont plus fréquentes.
Sherry Turkle, dans son livre Seuls ensemble, le résume ainsi 👇
« Le smartphone nuit à la capacité de s'impliquer pleinement dans un moment. »
Prenons l’exemple du repas 🍽
92% des Français disent que les écrans incarnent une rupture du lien avec les autres, et nuisent à la convivialité du repas.
Et c’est ce qui se passe : quand le cerveau pense qu’il peut être distrait ou interrompu à tout moment, la conversation va inconsciemment rester plus légère, et l’attention va se disperser plus souvent.
Obstacle à la profondeur, l’écran peut faire écran à la construction d’un vrai lien social. On sort de l’ici et du maintenant.
Tout le monde le sait, et pourtant 53% des personnes interrogées n'arrivent pas pour autant à déconnecter complètement.
Il y a quelque chose qui cloche.
Du 11 au 17 mars 2024, le restaurant du casino de la ville de Royat a mis en place une belle initiative.
Au début du repas, chaque convive était invité à mettre son smartphone dans une prison prévue à cet effet, et devait l’y laisser le temps du dîner.
Si le défi est relevé, il y a une récompense : 30% de l’addition est transformée en jetons pour aller jouer ensuite au casino.
L'objectif, en dehors du marketing ? Renouer avec l’essence d’un repas à plusieurs.
D’ailleurs, voici les 3 choses qui reviennent le plus après cette expérience 👇
On fait plus attention à ce qu'on mange
On a plus de conversations profondes
On se sent mieux
Avec ma copine, on a pris les devants. On va en général au restaurant sans téléphone.
Une fois sur place, ironie de la modernité technologique : le menu est parfois accessible uniquement via QR Code, nous obligeant à demander le menu papier.
Même si on veut se déconnecter le temps d’un moment social, on nous met des bâtons dans les roues 😂
Et si le téléphone reste visible pendant le repas, la table devient l’île de la tentation : dur de se maîtriser, même avec toute la volonté du monde.
Plus généralement, les moments où le téléphone n’est pas à portée de main deviennent rares. Même aux toilettes, le bougre nous accompagne.
Il faut réapprendre l’art de la présence déconnectée.
Comme en boxe, il faut savoir maîtriser la distance. Toucher sans se faire toucher.
🧘 Distance physique et contrôle de soi
Le problème de notre relation au smartphone réside souvent moins dans nos choix que dans le manque de contrôle de nos impulsions.
Les failles du cerveau sont habilement utilisées par les dealers d’attention pour perturber notre système de récompense et ancrer des habitudes.
Cela dépasse le cadre de la volonté : ce sont devenus des réflexes. Subis donc, plutôt qu’intentionnels.
Laura Branigan dans sa chanson phare, disait « You take my self-control ». Sortie en 1984, elle ne parlait vraisemblablement pas de son téléphone. Mais ces mots résonnent fortement 40 ans plus tard.
Le smartphone fait perdre le contrôle de soi. Il nous habitue à céder à la distraction, à s’interrompre.
La mise à distance est un contre-pied parfait.
Prenons l’exemple des sucreries. Qui arrive à ne pas prendre quelques bonbons s’il y a un paquet ouvert juste à côté ?
En revanche, si tu sens que ton désir de sucre monte, mais que tu n’as rien chez toi, ta seule option est d’aller au supermarché.
L’effort à fournir pour aller chercher la récompense est plus élevé. Tu ne vas y aller que si l’envie est véritablement irrésistible.
Ma copine m’a récemment fait découvrir ces bonbons suédois très populaires.
Dès qu’il y en a chez moi, à portée de main, c’est game over. Je sais que je vais terminer le paquet.
Pour rappel, le moindre effort est un penchant inné de l’être humain.
Sachant cela, on peut essayer de « hacker » cette inclinaison.
Si on diminue l’accessibilité d’une récompense, on force une sortie de notre confort pour l’atteindre.
Le cerveau est bien fait : on va inévitablement être moins tenté. En mettant de la distance physique, on va être moins enclin à se mettre en mouvement pour un rapide check du cellulaire.
On peut donc utiliser à notre avantage la recherche naturelle de confort non pas pour céder, mais pour résister à la distraction.
Dans l’édition sur les habitudes, j’évoquais cette boucle en 4 étapes que suit n’importe quel comportement qui s’ancre dans le cerveau 👇
Toute habitude commence par un signal qui va indiquer l’opportunité d’une récompense.
Mettre de la distance avec le téléphone se concentre sur la disparition, l’éloignement de ce signal.
Ce qui va perturber le raccourci créé dans le cerveau au bout d’un certain temps.
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Malgré tout, l’envie peut apparaître même sans signal, si l’habitude est déjà profondément enracinée.
L’éloignement physique va alors jouer un deuxième rôle, celui d’augmenter la friction entre toi et la réponse (la 3ème étape de toute habitude).
S’il faut aller chercher son téléphone à l’autre bout de la maison, ou ouvrir un coffre-fort avec un code pour y accéder, ça change la donne.
📵 La règle de la table
Dans l’optique de réduire progressivement la puissance d’attraction de mon smartphone, je mets un point d’honneur à l’éloigner de moi très souvent dans la journée.
Premièrement, j’ai un réveil qui me permet de ne pas avoir de téléphone dans la chambre, ni le soir en me couchant, ni le matin en me réveillant.
Deuxièmement, quand je prépare une session de deep work, je prends soin en amont de mettre mon téléphone dans une autre pièce.
Et depuis la semaine dernière, j’essaie de suivre une nouvelle discipline, la règle de la table.
Simple, basique. Pas de téléphone sur les tables 👉 ni pendant les repas, ni pendant que je travaille, ni avec mes amis ou ma famille.
Soit il est par terre, soit sur un meuble quelconque, soit dans un sac par exemple.
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Grâce à ce genre de règles simples, petit à petit, j’observe quelque chose d’intéressant.
La mise à distance fréquente et intentionnelle de mon téléphone engendre de facto une distance émotionnelle.
Je me sens moins captif, moins happé par ce fil invisible.
🍀 La petite trouvaille
Une catégorie de personnes qu’il faut éviter : les égoïstes numériques.
C’est tout pour l’édition aujourd’hui ! En espérant qu’elle te soit utile pour repenser certaines choses.
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A la semaine prochaine 💌
Julien
Sources :
J'essaie de me détacher de mon téléphone pendant que je suis avec mes amis et ma famille. Et encore le même constat ce weekend, bcp de personnes n'y arrivent pas et n'arrivent pas à rester 1 minute sans rien faire et prennent machinalement le téléphone. On jouait à un jeu de cartes et le temps de mélanger et de redistribuer les cartes, tous mes amis autour de la table sortaient systématiquement le téléphone. Ca met une sorte de distance avec ceux qui n'ont pas leur portable accessible. Le mien n'était pas à portée de main à ce moment mais s'il l'avait été j'aurais probablement fait pareil qu'eux. Ce n'est jamais simple de se défaire d'une mauvaise habitude :)
Encore une édition riche d'enseignements et ! Je vois aussi que nous avons la même faiblesse pour les bonbons 🫣...